En accès libre
Le chef de l’ONU a appelé ce mardi 29 octobre l’humanité à sortir de sa « crise existentielle » qui lui fait détruire la nature, sous les yeux des chefs d’État et ministres du monde réunis à Cali pour tenter de stimuler les derniers jours de négociations de la COP16.
A lire aussi
Interview COP16 : « Des politiques climatiques peuvent s’avérer néfastes pour la biodiversité »
En accès libre
« Chaque année, nous voyons les températures augmenter de plus en plus ; chaque jour, nous perdons de nouvelles espèces ; chaque minute, nous déversons un camion de déchets plastiques dans nos océans, nos rivières et nos lacs. (…) C’est à cela que ressemble une crise existentielle », a déclaré Antonio Guterres à la tribune de la 16ème conférence des Nations unies sur la biodiversité.
A Cali, 196 pays tentent depuis le 21 octobre d’accorder leurs postures sur la manière de tenir d’ici 2030 les objectifs fixés il y a deux ans dans l’accord de Kunming-Montréal : placer 30% de la planète sous protection minimale, réduire de moitié les risques des pesticides et l’introduction des espèces invasives, mobiliser 200 milliards de dollars par an pour la nature, etc…
« Ce que nous vivons est pire que l’Apocalypse »
Mais à trois jours du terme, vendredi, le ballet des négociateurs est encore englué dans les rivalités entre pays riches et en développement, en premier lieu sur les questions financières, préfiguration du bras de fer attendu en novembre à la COP29 sur le climat de Bakou. « Aucun pays, riche ou pauvre, n’est à l’abri des ravages causés par le changement climatique, la perte de biodiversité, la dégradation des sols et la pollution », leur a rappelé Antonio Guterres.
Avant lui, le président Colombien Gustavo Petro a livré, sans texte, une diatribe anticapitaliste de 45 minutes, fustigeant les « agents de la cupidité », le dollar, le pétrole, les États-Unis anti-migrants ou encore la Chine première détentrice de la dette des pays en développement, le FMI. « Ce que nous vivons est pire que l’Apocalypse » décrite dans la bible, a lancé Gustavo Petro, dont le discours a reçu une vive approbation d’une partie de l’assemblée.
A lire aussi
Comment la pensée a remis l’humain à sa place (parmi les animaux)
Abonné
En l’absence du Brésilien Lula, pour raison médicale, le sommet accueille les présidents d’Arménie – sur les rangs pour accueillir la COP17 face à son rival de l’Azerbaïdjan – de Guinée-Bissau, Haïti, Equateur et Suriname, ainsi que de 115 ministres, chargés de fournir le poids politique pour faire de la COP16 un succès.
Les discussions achoppent encore sur l’adoption d’un mécanisme pour que les bénéfices d’entreprises – cosmétiques et pharmaceutiques en tête – grâce aux données génétiques numérisées (DSI, en anglais) de plantes et d’animaux prélevées dans le monde en développement soient partagés avec les communautés qui les ont conservées.
Une espèce d’arbre sur trois menacée d’extinction
Or le temps presse : à cinq ans du but, seuls 17,6% des terres et des eaux intérieures et 8,4% des océans et zones côtières se trouvent dans des zones protégées, selon le rapport de référence dévoilé lundi à Cali. Et les destructions de la nature, par la déforestation, la surexploitation ou le changement climatique, se poursuivent : une espèce d’arbre sur trois est menacée d’extinction, selon la Liste rouge de l’UICN.
La COP16 sur la biodiversité a déjà réussi à mettre la crise de la nature sur « un pied d’égalité » avec la crise climatique, s’est toutefois félicitée lundi sa présidente colombienne Susana Muhamad dans un entretien à l’AFP. Avec 23.000 participants annoncés, c’est la plus grande COP biodiversité jamais organisée et la « zone verte », immense forum culturel festif et militant dans le centre-ville, est un succès populaire, faisant presque oublier la forte présence militaire à cause des menaces de la guérilla.
A lire aussi
Ces 12 travaux qui font revivre la nature dans les villes
Abonné
Une série de décisions, notamment sur la création d’un organe de représentation des peuples autochtones, sont en bonne voie. Mais le coeur de la COP16 reste d’établir des règles de suivi ambitieuses pour que les pays soient redevables de leurs efforts. Et qu’un bilan crédible soit établi à la COP17 en 2026.
L’accord de Kunming-Montréal n’étant pas contraignant, « cette forme de pression par les pairs est essentielle », souligne Sébastien Treyer, de l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Sauf que l’accord sur ce point dépend des discussions sur la finance. Pour donner un signal, huit gouvernements ont annoncé lundi des contributions portant à 400 millions de dollars la dotation du récent fonds mondial pour la biodiversité (GBFF, en anglais).
Cette démarche s’inscrit dans l’objectif de vingt milliards de dollars d’aide annuelle pour la biodiversité promise par les pays développés d’ici 2025. En 2022, cette aide atteignait environ quinze milliards, selon l’OCDE.