La Confédération des syndicats nationaux passe à la vitesse supérieure dans sa lutte contre la détérioration du réseau de la santé québécois. Le syndicat exhorte le ministre de la Santé, Christian Dubé, à faire cesser l’exode des médecins du public vers le privé.
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Dans un communiqué publié dimanche matin, la Confédération tape du pied en pointant les désaffiliations croissantes de médecins au régime public d’assurance maladie (RAMQ). Il cite notamment les données de la RAMQ qui indiquent que, rien qu’en 2024, le nombre de médecins de famille désaffiliés était de l’ordre de 500, un chiffre, continue le syndicat, qui aurait quadruplé depuis 2019.
Selon la présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), le gouvernement québécois pourrait mettre fin à cet exode « dès lundi ». Caroline Senneville affirme dans le communiqué du syndicat que « le gouvernement n’a pas d’excuse » quant à ces départs du public au profit du privé.
En entrevue, plus tard dans la journée, la syndicaliste explique que « c’est la loi qui cadre le fait que des médecins puissent aller au privé comme ça. » Elle pointe du doigt le fait que la loi québécoise n’autorise pas les médecins à exercer en même temps dans un établissement privé et dans un établissement public, « mais ce que la loi permet, c’est que vous pouvez travailler au privé et au public si vous faites de la télémédecine. On pourrait mettre un verrou. »
Elle rappelle également qu’un médecin peut alterner entre public et privé. « Vous pouvez faire trois mois dans le réseau public, trois mois dans le réseau privé, trois mois dans le réseau public… Et là, c’est vraiment pervers, parce que vous faites trois mois dans le réseau public, vous recevez des gens, puis vous leur dites “si vous venez dans le public, je n’ai pas le temps de vous voir avant deux ans ou un an pour l’opération, mais si je vous mets dans ma pratique privée, je pourrais vous offrir une plage dans deux ou trois mois”. »
Mme Senneville s’insurge contre le fait que les patients québécois sont ainsi de plus en plus confrontés à un dilemme : attendre ou payer. Et l’attente semble de moins en moins être une option acceptable, car, d’après un sondage du Journal de Québec et de la firme Léger réalisé fin septembre auprès de 1002 personnes, en cinq ans, les Québécois étaient 17 % de plus à se tourner vers le réseau privé pour recevoir des soins.
Toujours selon le sondage, la moitié des 34 ans et moins ont payé pour des soins médicaux au cours des cinq dernières années, contre 36 % des 55 ans et plus pour la même période.
Caroline Senneville s’exclame à ce sujet : « On tient de plus en plus pour acquis que le service public ne répond plus à nos besoins. On s’est comme résignés à payer. Mais, nous, ce qu’on dit, c’est “non, cessons de nous résigner et donnons-nous les moyens d’avoir un service public en santé fort et efficace”. »
La CSN annonce qu’elle proposera une série de mesures lors d’un grand rassemblement, le 23 novembre, au Colisée Vidéotron de Trois-Rivières. Ce plan doit faire suite à la campagne menée depuis plusieurs mois par le syndicat et baptisée Pas de profit sur la maladie.
Le syndicat n’en dévoilera pas plus pour l’instant sur ses pistes de solutions. Mme Senneville insiste simplement sur le fait que celles-ci doivent garantir que l’accès aux soins de santé « soit basé sur nos besoins et non pas l’épaisseur de notre portefeuille ».
Le ministère n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire.
Avec des archives de Katrine Desautels